On va tout de suite casser les paillettes de Kevin : ce cocktail, c’est le chaos. Et puis en même temps, ai-je le droit de me plaindre puisque je l’ai choisi? Eh bien oui. Parce que j’ai choisi mon métier, pas mes troubles.
Je n’aime pas du tout ce concept sociétaire où on se doit de toujours être parfait et où dire ce qui ne va pas est automatiquement perçu comme se plaindre et être quelqu’un de lourdingue. Comme notre très cher Freud nous l’a si bien écrit, nous sommes des êtres émotionnels et imparfaits, ce qui fait que les émotions font parties intégrantes de nous. Alors pourquoi nous n’aurions pas le droit de les exprimer?
Ceci étant dit, et je parlerai de ce concept plus approfondi dans un autre billet, revenons à nos moutons.
Être entrepreneur, ce n’est pas du tout, malgré ce que beaucoup pense, des vacances sur le long terme. Certes nous sommes libres de nous organiser comme nous le voulons, mais à quel prix? S’organiser et tout gérer quand on a comme alter-ego une anxiété quasi généralisée selon les périodes, exacerbée par une hypersensibilité et un trouble de l’attention qui perd tout le monde car il ne respecte jamais les délais, c’est franchement pas le meilleur des cadeaux.
Comment on fait Josselin? Comme on peut, vous répondrai-je. On utilise des carnets, beaucoup de carnets. Avec beaucoup, beaucoup de listes. Qu’on note partout, à pleins d’endroits différents, pour être sûre de ne rien oublier. Parce qu’on les connaît ces endroits où on se dit “je m’en souviendrai”… Ton TDAH ne s’en souviendra jamais. Et encore moins en période d’anxiété.
Ce qui est incroyable, c’est le lien que crée ton trouble de l’attention et ton anxiété.. Généralement, si l’un des deux décide de partir en free-style, t’es sûre que l’autre suit, et en pire. Alors voilà comment on se retrouve à repousser des délais, à oublier de vous répondre et même oublier de prendre le temps de répondre à cet ami, qui vous a écrit il y a six semaines, à qui vous pensez tous les jours mais sans jamais passer à l’acte. Puis aussi pourquoi on angoisse tout le temps avec les papiers, parce que pour limiter l’impact émotionnel et physique de l’anxiété, on procrastine. Ben oui, oublier n’était pas assez, il fallait aussi repousser les choses pour se protéger, comme si une journée n’était déjà pas assez courte.
Ce qu’on ne dit que trop rarement, c’est que l’anxiété décale aussi notre réveil pour nous. Ah elle est douée quand même, parce qu’en pleine période d’angoisse, tu peux toujours t’accrocher pour respecter l’heure de levé que tu t’es fixé. Puis l’heure du coucher.. n’en parlons même pas. Entre la procrastination qui retarde ton coucher parce que t’angoisse de ce que tu as à faire dans les jours à venir, puis le scroll intensif de ton écran pour faire taire ton cerveau qui n’arrête pas d’alimenter ton angoisse… Comment veux-tu te coucher à l’heure? Sachant que déjà se lever du canapé pour aller dans le lit nous coûte bien des cuillères, à nous, neurodivergents.
Alors, comment on fait du coup ? On adapte comme on peut, on demande aux clients d’être indulgents, on essaye de se garder des moments off et repos (où on essaye de ne pas culpabiliser de rien faire), on tente d’aménager cet emploi du temps au mieux selon nos capacités du moment.. Mais c’est parfois difficile quand dans la même journée, tu as jonglé avec plusieurs humeurs opposées à cause de ton anxiété et de ton hypersensibilité.
Voilà pourquoi je dis toujours que l’on ne doit pas juger. Personne. Notre passé, nos traumas, nos blessures, tout cela est la raison de nos troubles. On ne les choisit pas. Jamais. Je lutte avec mon anxiété depuis environ quinze ans. J’ai mit le nom sur mon hypersensibilité il y a moins de dix ans, et mon TDAH n’a même pas encore été officiellement diagnostiqué tant le fait de devoir faire milles aller-retours en grande ville et remplir des dizaines de papiers me fait flipper.
Je parle souvent à la troisième personne car je sais que je suis loin d’être la seule dans ce cas. Je sais que pour beaucoup, mettre les mots sur ses maux est difficile, et en parler autour de soi encore plus. Et non, je ne changerai pas de métier même si cela m’allégerait dans un certain point, car je sais que l’angoisse de retourner entre quatre murs tous les jours sans jamais pouvoir respecter mon rythme me terroriserait au point que mon corps se mettrait de lui-même en pause. Alors j’exprime. Je raconte. Je soutiens. Comme je peux, qui je peux, en disant que nous ne sommes que des humains et qu’on essaye, tant bien que mal, de guérir de nos blessures et d’avancer sur une voie qui nous rendra la vie un peu plus agréable à traverser.
Être Entrepreneur, c’est beaucoup plus qu’un métier. Cela nous impact au plus profond de nous-même, d’autant plus quand, comme moi, on est hypersensible, anxieux et TDAH.
Alors pour tous les entrepreneurs et les autres qui galèrent parce qu’ils sont différents de ce qu’on attend d’eux: vous n’êtes pas seuls. Faites vous accompagner. N’ayez pas honte de qui vous êtes. Prenez soin de vous, vous le méritez. 💜
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